Fermer les pages du passé et vivre dans la réalité actuelle ?
« Les autorités arméniennes et les Arméniens d’aujourd’hui devraient fermer les
pages du passé et vivre dans la réalité actuelle … » selon Gaidz Minassian,
politologue célèbre … (Noyan Tapan, 30/125, 26 juillet 2019)
Déclaration plutôt sommaire, je dirais même sans grande résonance avec les actualités arméniennes.
En réalité,
aujourd’hui tout Arménien, où qu’il soit, est au courant se reconnaissant
dans les changements et refontes pro-démocratique en Arménie sous la
houlette du Premier Ministre (et futur Président), Nikol Pashinian et Anna
Hakopian, son épouse et co-équipière, en l’absence, appréciable de toute
opposition organisée. Une révolution de velours suivie de près par tous. A
savoir, le fonctionnement des institutions démocratiques en toute transparence
et dans le respect des principes des droits l’homme.
Nombreux
journalistes, chroniqueurs, internet, presse et média, ainsi que la communauté
internationale ont largement diffusé et commenté l’évolution des institutions –
la renaissance socio-politique en Arménie – renforcé de visites en personne de
N. Pashinian à travers le monde et, à l’ONU, venant compléter diverses
projections, films, conférences, débats et autres manifestations, notamment
en Occident, aux USA et Canada .
À présent on est tous braqués sur l’avenir – la mise en application effective – des réformes (en prime l’écologie, la santé pour tous et la création d’emploi) prônées par cette nouvelle gouvernance – l’Arménie étant donnée comme exemple d’état de droit aux normes internationales des plus avancées. !
N’empêche que, la question du génocide – déni, impunité, propagande négationniste, dissimulation/suppression des faits et des infos – ainsi que le conflit non résolu du NK/Artsakh demeurent et sont évoqués systématiquement sur l’échiquier politique mondial.
Pourquoi ?
Parce que depuis l’adhésion de l’Arménie aux Nations Unies et ses agences, les
questions du génocide ainsi que les revendications territoriales de
l’Azerbaïdjan (en tandem avec la Turquie) figurent sur les agendas
internationaux. Notamment de l’Assemblée générale à NY et du Conseil des droits
de l’homme, à Genève et, encore, d’autres organes de l’ONU.
(a) L’Arménie et ses neuf résolutions (avec consultations) sur le prévention du génocide, toutes adoptées à l’unanimité au Conseil des droits de l’homme;
(b) l’obstination d’Azerbaïdjan à relancer ses résolutions au Conseil de sécurité clamant le retour d’ d’Artsakh sous administration azérie – (Note : très récemment leurs contenues a été invalidées par la délégation arménienne) ;
(c) les interventions des trois protagonistes aux sommet et au cours de réunions ordinaires ainsi que les fameux « droits de réponse » Arménie- Azerbaïdjan, Turquie;
(d) les rapports, notes et nombreux autres documents présentés au cours des sessions – gardent la brèche ouverte sur fond de guerre diplomatique exacerbée.
Or, si
actuellement, d’autres urgences préoccupent la scène internationale et les
questions arméniennes ne font pas la unes, elles restent, néanmoins, présentes
et nous interpellent tous.
Voir
ordres du jour et autres documents en ligne sur les sites de l’ONU – NY et
Genève notamment les docs OHCHR.
(Haut-commissariat
des Nations Unies aux Droits de l’homme).
Comment donc
rester cloué sur son siège lorsque, de session en session, Azerbaïdjan –
fameux pour son langage haineux et discriminatoire, agresse l’Arménie – sa
mémoire, son histoire/patrimoine et son identité ?
(Dernière
trouvaille « l’Arménie est « tributaire d’idéologie nazie, entièrement
responsable de la guerre de NK…).
Prolongement de fake news. Pendant que la Turquie qualifie le génocide
… « d’une
sorte d’hallucination arménienne… dont elle devrait s’affranchir … » !
En réalité au cours des réunions/affrontements internationaux ce sont les délégations arméniennes qui réagissent, répondent, et, selon leur contenu, contre-attaquant, ces déclarations outrageantes et diffamatoires. Devant un parquet de représentants d’Etats membres, des intergouvernementales, ONG et autres porte-paroles diplomatiques. Avec l’urgence de défendre les thèses arméniennes, rétablir les faits et les vérités. Depuis 1992, Pashinian, Mnatsakanian, Nalbandian, Sargsyan, Abgarian, Tolmadjian, Nazarian, Kirakossian et autres dignitaires arméniens en ont été les champions. Suivis de droit de réponse des plus ciblés.
En revanche,
la Diaspora est toujours absente des rencontres multilatérales. Bien
qu’elle ait tous les droits légitimes de s’impliquer dans la défense des
causes arméniennes – transformées en guerre froide – au sein des instances
internationales. Ce qui, non seulement représente de nouveaux cadres de
négociations, mais exigent un changement de mentalité et de nouvelles approches
adaptées.
Désormais,
comment tourner les pages du passé alors qu’il demeure consubstantiel avec le
présent, se répercutant dans l’ensemble des trajectoires actuels arméniens.
Autant dire que tant que les blocus aux frontières demeurent et que le processus de normalisation des relations entre les trois Etats reste lettre-morte, on ne peut pas se couper le passé en un tour de main mais plutôt continuer le bras-de-fer diplomatique, sur tous les fronts et par tous.
Aline Dedeyan (adedeyan@yahoo.com)