« Combat de la Libération du Karabagh, 1988-1994 ».
Le combat héroïque de Karindag.

 Traduit de l’ouvrage de Vardkés Bagherian

Il est Vice Président de la télévision du Karabagh, en 1988, et dirigeant de la télévision de 1995 à 1998.  Puis, responsable de la communication de la Mairie de Stépanakert.
En 1999 il est conseiller au cabinet présidentiel. De 2005 à 2008, il a été le directeur de la télé nationale, puis, quelques mois, vice-président du ministère de la Culture et de l’Enfance.
Il est le Président  du  bureau du Parti Gouvernemental (A J G), et enfin Député au Parlement.
Il a écrit de nombreux ouvrages et il a réalisé un film pour la télévision « En feuilletant les Pages de l’Histoire », qui a été récompensé, en 2007,  par la médaille: « Yeriché Tcharentz ».

Ceux qui sont déjà allé à Karindag, connaissent l’emplacement de ce village, en face de Chouchi. Evidemment, maintenant tout est banal en ces lieux, et Karindag mène une normale, car Chouchi est désormais  à nous, et  veille, du haut, au calme de ce village.

Cependant en janvier 1992, Chouchi n’était pas encore libéré, et depuis sa position faisait continuellement pleuvoir du « feu », sur Karindag, qui était cerné depuis des mois. Voyant que les habitants ne se rendaient pas et que les femmes et les enfants ne l’avaient pas quitté,  le  Commandement militaire d’Azerbaïdjan, a décidé de résoudre définitivement le problème de cet orgueilleux village. et le soir du 26 janvier, après avoir encerclé le village, à 6h 30 , les troupes azéries, fortes de plus de 500 soldats et appuyés de 3 blindés sont montés à l’assaut, commandés par le Chef des opérations militaire, et le  Ministre de la Défense de l’Azerbaïdjan : Mehdiev, lui-même.

Ce qui témoigne, combien l’agresseur  attachait de l’importance à cette opération.

Les troupes d’autodéfenses, fortes de 60 à 70 hommes, étaient commandées par le représentant du Conseil Suprême du Karabagh : Vararchag Haroutounian, et avec des volontaires venus de la Mère Patrie, ils ont pu résister durant 12 heures aux troupes ennemies, bien supérieures en nombre, jusqu’à l’arrivée à l’aide de la première section  de Achod Ghoulian, près des habitations où se trouvaient les troupes d’autodéfenses, et conjointement, ils ont fait fuir l’ennemi, qui a laissé près de 100 victimes sur le terrain. Malheureusement, nous avons aussi dénombré des victimes dans nos rangs,  parmi lesquelles le Commandant V. Haroutounian, qui a été décoré, à titre posthume, de la « Croix de première Classe du Combattant ».

Je me souviens (dit, Bagherian), que lorsque le 26 janvier, à midi, le bruit des combats à cessé, nous avons décidé avec l’opérateur : Kéorki Ghazarian,  d’aller  filme sur les lieux,    mais nous n’avons pas trouvé de véhicule. Nous sommes donc allé à hôpital, avec l’espoir d’y trouver un moyen de transport.  Et là, on nous a dit qu’il était impossible de nous y rendre, car de violents combats s’y déroulaient encore. De nombreux blessés parvenaient sans cesse à l’hôpital, parmi lesquels j’ai reconnu mon ami : Arsène Chahoumian, qui avait été difficilement arraché à un camion renversé, et ma peine a décuplée.

      On avait aussi, amené le corps d’une victime  de la lutte de l’indépendance, Krichig, chez nos amis  et voisins : Arnold, en attendant que la famille vienne du village de Azkeni et, le ramène. Lorsque le lendemain ils chargeaient le cercueil dans la voiture, son père, l’instituteur Ardo Mikaëlian, un collègue avec lequel j’enseignais dans la même école jusqu’en 1974, s’est  adressé aux présents  en avalant les larmes amères qui coulaient de ses yeux, et a dit :

« Peuple, je ne suis pas en deuil, car mon fils s’est sacrifié pour la libération de l’Artsakh. Vous non plus ne pleurez pas !  Soyez fier d’avoir de tels enfants » !

C’étaient des paroles émouvantes, qui ont bouleversés tous les présents.

Les autres victimes qui s’étaient sacrifiées pour la lutte de libération de Karindag, ont été inhumées provisoirement au Mémorial du Souvenir de Stépanakert. Ce n’est qu’après la libération de Chouchi, que ceux-ci ont été, à nouveau, enterrés dans leur village natal.

Le 26 janvier est entré, en tant que bataille héroïque, dans l’histoire de la libération de Karindag. Cette victoire n’est pas seulement une victoire militaire, mais elle est surtout une victoire morale. Nous nous sommes prouvé que nous étions capable de réaliser des miracles.

Ce qui a été fait, à Karindag, est une fierté pour la population, et un  symbole de  persévérance. 

Et déjà, lorsqu’en 1997, lors de la commémoration du 5e anniversaire de cette bataille, le représentant du Ministre de la Défense, Ceyran Ohanian, avait, à juste titre, rappelé les faits, en disant : « La prise de conscience de la glorieuse  victoire de cette  bataille pour la libération, a eu des conséquences exemplaires,  qui ont été confirmées  par de nombreux autres faits ».

Et après de longues années, lorsqu’un  journaliste étranger venu à Stépanakert, m’a demandé : «  Grâce à quoi  avez-vous triomphé ? Qu’elle en est l’explication » ?

Je lui ai répondu : «  C’était la force de notre conscience, il n’y a aucune autre philosophie ».

Et je  lui ai raconté deux faits, dont l’un s’est déroulé à Karindag.

 «  En 1992, Aramis était un garçon de 10-12 ans. Et le 26 janvier, lorsque les azéris sont entré à l’extrémité du village, et ont  commencé à  incendier les maisons, sa mère s’est précipitée hors de sa maison pour protéger ses enfants. Aramis a vu combien sa mère était brûlée. A ce moment il s’est approché de sa mère à la vitesse d’un éclair, bien convaincu qu’elle n’était plus vivante, il ne s’est pas affligé, et a arraché le fusil qu’elle serrait entre ses doigts, et a couru pour prendre position auprès de son père ».     

Lorsque j’ai fini de raconter ces faits, le journaliste y croyait sans y croire, tout comme moi d’ailleurs,  lorsqu’on m’avait raconté cette histoire qui semblait incroyable.

Chez nous, il n’y a pas d’appellation « Ville héroïque, ou village héroïque ».

Et si cela était, j’offrirais sûrement cette appellation,  parmi les premières,  à Karindag.

Quant au second fait extraordinaire,  que j’ai raconté, il est arrivé en septembre 1992 à un collègue étranger, à Tchlentrane,  dans la région de Martakert.

Il n’y avait plus aucune habitation debout, dans le village. Sauf celle d’un habitant de 80 ans, Hrant Sarkissian, dont la femme était clouée au lit.  Malheureusement, les défenseurs étaient obligés d’abandonner le village, car l’ennemi bien supérieur en nombre, avançait inexorablement. Les soldats ont dit au vieux Hrant de partir.

«   Partez, moi je reste » !   A-t-il répondu.

Il était inconcevable de le convaincre de partir, car ses explications étaient plus que raisonnables. Sa femme, impotente était clouée au lit, et son fils tué durant la libération de Chouchi, gisait dans une pièce.

Il avait des comptes à régler avec les turcs.

En entrant dans le village, les azéris,  incendiaient les maisons une à une, cependant lorsqu’ils sont arrivés près de la maison de Hrant Sarkissian, il est arrivé quelque chose inattendu. Lorsqu’ils se sont approchés, un premier soldat a été abattu, puis un deuxième, un troisième, un quatrième .. . Les azéris ne comprenaient  ce qui se passait. Un vieillard se battait  contre eux avec un fusil. Toutes les tentatives pour pénétrer dans la maison s’étaient avérées vaines.   A chaque coup de feu, un cadavre de plus gisait au sol. Cela lassait l’impression, qu’il y avait un grand nombre de combattants dans la maison. Or, en réalité, le vieux Hrant, changeait rapidement de place et tirait sur ceux qui s’approchaient. Persuadés, qu’ils ne pourraient pas prendre la maison, ils y ont mis le feu de tout côtés.

Quelle a été alors leur surprise, lorsqu’ils se sont aperçu, que personne n’en sortait.

Ils n’ont rien compris, car ce qu’avait fait Hrant, était bien loin de leur pensée, et de leur nature.

Il y a bien d’autres histoires, qui paraissent aussi incroyables que celle-ci, qui prouvent une chose : Un peuple qui se redresse pour défendre ses Terres, qui accepte tous les actes héroïques, est  invincible.

Conclusion de Vardkés.

Je suis heureux et fier que mon ami : Garbis, ait traduit quelques passages de mon livre : « 1988-1994 », afin  que les lecteurs français puissent avoir une approche « partielle » de ces jours héroïques, lorsque l’Artzakh était obligé de résister à l’agresseur azéri »

«  Je voudrais  que la France, qui a été le pays  modèle de la  Liberté, comprenne et apprenne le désir et la volonté des Arméniens à l’aspiration de cette Liberté ».